28 février 2012

Réunion du 28 février 2012 : Communiqué des Arbitres de Ligue

Suite au conflit né des propos de M. Daniel Bourlier, Vice-président de la ligue, assimilant la pratique du covoiturage à de l'escroquerie, à l'occasion de l'assemblée générale des clubs le 4 novembre 2011, les représentants des arbitres de ligue, soucieux de l'intérêt des clubs et des compétitions, ont répondu favorablement à l'invitation du Président de la ligue de participer à une réunion de concertation ce mardi 28 février, en présence de M. BOURLIER.

A cette occasion, les représentants des arbitres ont, à plusieurs reprises, demandé les excuses officielles de M.BOURLIER, demande déjà exprimée, en vain, le 4 février lors de la réunion du groupe de travail organisé par le Président de la ligue.

M. BOURLIER a clairement refusé de s'excuser pour ses propos, au motif que des plaintes avaient été déposées à son encontre. Cependant, dans un esprit d'ouverture, les représentants des arbitres ont indiqué que, si des excuses étaient prononcées, les plaintes déposées seraient retirées.

Malgré cette nouvelle proposition constructive, M.BOURLIER a maintenu sa position négative.

Dès lors, il est le seul reponsable de la situation actuelle de blocage des compétitions qui pénalise nos clubs.

Dans ces conditions, les arbitres de ligue, meurtris par ces propos qui les décrédibilisent auprès des clubs, ne peuvent que déplorer encore plus cette attitude qui démontre le peu de crédit accordé à leur fonction par les instances.

18 février 2012

Le conflit s'enlise...

Alors que la table ronde du 4 février dernier semblait avoir calmé les esprits, un communiqué publié ce jeudi par la Ligue a sérieusement irrité les arbitres, qui seront plus que jamais en grève dès le week-end prochain.

On y a cru. À tort. Malgré la longue discussion entre toutes les parties, organisée à Besançon au début du mois, la situation n’est pas apaisée entre les arbitres régionaux et la Ligue de Franche-Comté (voir nos précédentes éditions). Pire encore : la tension est montée d’un cran hier. À l’issue de la table ronde, il avait en effet été décidé la publication d’un communiqué commun, sorte de pacte officiel sinon de paix, au moins de non-agression. Et c’est justement ce communiqué qui a mis le feu aux poudres.
Il devait être rédigé pour le mardi 7 février… mais les représentants des arbitres n’ont reçu le « premier jet » que ce mercredi soir, avant d’être sommés de donner leur avis sur le texte pour le lendemain midi. Or, leur réunion n’étant prévue que jeudi soir, ils n’ont pu respecter ces délais… et ont vu la Ligue publier ledit communiqué avant même la tenue de l’entrevue des hommes en noir. Il y est dit, entre autres, que « le dialogue doit être renoué », que « le mouvement de mise en indisponibilité (des arbitres) doit être levé dans l’intérêt supérieur du football régional », mais aussi que « le terme escroquerie », qui a mis le feu aux poudres lors de la dernière AG, « a pu être mal interprété ». Il n’en fallait pas plus pour ranimer les braises d’un feu qui va brûler, dès le week-end prochain, l’ensemble du football régional.


Les arbitres régionaux ne prendront pas le sifflet le week-end prochain…

Qui va arbitrer le week-end prochain ?

Les arbitres, dans une cinglante réponse, ont en effet confirmé hier matin par le biais d’un communiqué (un de plus, voir encadré) qu’ils maintenaient plus que jamais le mouvement de grève, qui débutera le 22 février et privera la quasi-totalité des matches de niveau régional d’’arbitre officiel (61 des 65 hommes en noir de niveau ligue ont annoncé leur mise en retrait). « Ils sont tous remontés comme des coucous, autant sur le fond que sur la forme », nous confiait hier leur représentant, Sébastien Moreira. À la Ligue, on ne comprend pas vraiment pourquoi les « sifflets » s’acharnent dans cette voie, ni cette volonté d’obtenir coûte que coûte les excuses officielles de Daniel Bourlier, celui qui a prononcé le fameux mot « escroquerie » lors de l’AG. Mais dont le silence peut aussi se comprendre : plus d’une trentaine de plaintes au tribunal pour « injures publiques » ont été déposées contre lui… C’est dans ce climat de défiance que l’on s’achemine inéluctablement vers une situation ubuesque : la quasi-totalité des matches organisés le week-end prochain se joueront sans arbitre. Il semble en effet délicat de réquisitionner ceux de niveau district (soit solidaires du mouvement, soit certainement réquisitionnés par leur district d’appartenance, comme c’est imaginé en Haute-Saône). On pourrait donc en arriver à un tirage au sort entre un dirigeant de chaque équipe, qui sera ensuite appelé à diriger les débats, tant bien que mal. « On espère toutefois ne pas en arriver là », confiait-on hier après-midi à la Ligue. On voit pourtant mal comment un terrain d’entente pourrait être trouvé, au moment où la tension entre les deux camps n’a jamais été aussi forte.
Voici quelques extraits du communiqué publié hier matin, et que vous pouvez retrouver en intégralité sur notre site www.lepays.fr.
« Il s’avère que les instances dirigeantes ont transmis seulement ce mercredi, soit 11 jours après cette réunion, un projet de communiqué à nos trois représentants en leur proposant d’émettre leurs éventuelles observations au plus tard pour le jeudi à midi. Nos représentants, qui avaient préalablement informé le Président de la ligue de la tenue d’une réunion des arbitres destinée à étudier ce projet le jeudi 16 février en soirée, ont fait part aux instances dirigeantes de leur impossibilité de répondre dans un délai aussi bref et de leur totale incompréhension face à cette attitude à la fois inadaptée, inadmissible et allant dans le sens contraire du dialogue que les autorités affirment revendiquer. Cependant, ces instances n’en ont absolument pas tenu compte et ont diffusé ce communiqué. […] Sur le fond de l’affaire, ce communiqué reprend de manière tout aussi inadmissible et orientée les motifs du conflit, d’une part en laissant penser aux clubs que la situation de blocage est provoquée par les arbitres alors que ce sont les instances de la ligue qui en sont à l’origine […], d’autre part, en n’exprimant aucune excuse pour ces propos ayant, entre autres, volontairement jeté le discrédit sur le corps arbitral de ligue […], elles osent même affirmer que ces propos graves auraient été mal interprétés par ceux qui en sont victimes ! Par cette attitude aussi inqualifiable sur le fond que sur la forme, les instances dirigeantes de la ligue et son Président, après avoir laissé pourrir pendant plusieurs mois une situation provoquée de manière totalement préméditée par l’un de leurs dirigeants, ont elles-mêmes rompu le contrat moral. Dans ces conditions, nous vous informons que les arbitres de ligue ont décidé ce jeudi 16 février, à l’unanimité des membres présents, de maintenir leur mise en indisponibilité à compter du 22 février, et de maintenir leur demande d’excuse de la part de l’auteur de ces propos ».
Ils ont tenté de consentir des efforts. De faire un pas en direction de l’autre, même s’ils ne pouvaient pas se voir en peinture. D’arrondir les angles lors d’une table finalement pas très ronde. Beaucoup d’entre eux ont serré fort le poing dans leur poche. Retenu quelques phrases assassines. Dans l’intérêt supérieur du football régional. Mais, on l’a compris hier matin, toutes ces démarches, aussi louables soient-elles, étaient vouées à l’échec.
Quelques élus de la Ligue de Franche-Comté d’un côté, et les arbitres régionaux de l’autre ont avancé l’un vers l’autre avec tellement de rancœur que l’enjeu, bien plus important que leurs petites querelles, ne pouvait suffire à régler le conflit. Dans les deux camps, on relève le moindre mot prononcé de travers. On scrute les heures d’envoi des mails, les virgules mal placées, afin d’en fournir son arsenal de combat. Des méthodes que l’on constate actuellement, au quotidien, dans n’importe quel journal télévisé. Présidentielle oblige. Ce qui nous pousse, aujourd’hui, à demander aux uns et autres un peu de franchise. Et de reconnaître tout simplement, à quelques mois des élections, qu’ils sont d’ores et déjà entrés en campagne.

LE PAYS

17 février 2012

Communiqué

Communiqué des arbitres de ligue aux membres du Conseil de ligue, aux personnes invitées au groupe de travail du 4 février 2012 et aux clubs de la ligue de football

A l'issue de la réunion organisée par la ligue de Franche-Comté de football le 4 février 2012, faisant suite aux propos du Vice-Président de cette instance lors de l'AG du 4 novembre 2011, les participants avaient conclu les accords suivants :

- élaboration dans les jours qui suivaient d'un projet de texte soumis au préalable à l’appréciation des représentants des arbitres, lors d’une rencontre au siège de ligue, avant diffusion,
- mise en place d'un groupe de travail destiné à étudier les modalités d’indemnisation des arbitres,

Or, il s'avère que les instances dirigeantes de la ligue ont transmis seulement ce mercredi 15 février, soit 11 jours après cette réunion, un projet de communiqué, avalisé par le Bureau de ligue, à nos trois représentants (Claude RAVIER, Lois GAUME et Christophe TORRES) en leur proposant d'émettre leurs éventuelles observations par retour de mail et au plus tard pour le jeudi 16 février à midi.

Nos représentants, qui avaient préalablement informé le Président de la ligue de la tenue d'une réunion des arbitres destinée à étudier ce projet le jeudi 16 février en soirée, ont fait part aux instances dirigeantes de leur impossibilité de répondre dans un délai aussi bref et de leur totale incompréhension face à cette attitude à la fois inadaptée, inadmissible et allant dans le sens contraire du dialogue que les autorités affirment revendiquer.

Cependant, ces instances n'en ont absolument pas tenu compte et ont diffusé ce communiqué dans le Journal officiel électronique de la ligue de ce même jeudi 16 février. Ce faisant, elles sont allées à l'encontre de leur propres décisions, prises en réunion de bureau le 6 février et diffusées dans ce même journal officiel !

Sur le fond de l'affaire, ce communiqué reprend de manière tout aussi inadmissible et orientée les motifs du conflit:

- d'une part en laissant penser aux clubs que la situation de blocage est provoquée par les arbitres alors que ce sont les instances de la ligue qui en sont à l'origine et qui prennent les clubs en otage par les propos diffamatoires prononcés par le Vice-président de la ligue,
- d'autre part, en n'exprimant aucune excuse pour ces propos ayant, entre autres, volontairement jeté le discrédit sur le corps arbitral de ligue en pleine Assemblée générale et devant tous les clubs. Bien au contraire, elles osent affirmer que ces propos graves auraient été mal interprétés par ceux qui en sont victimes et dont l'honneur a été sali !

Par cette attitude aussi inqualifiable sur le fond que sur la forme, les instances dirigeantes de la ligue et son Président, après avoir laissé pourrir pendant plusieurs mois une situation provoquée de manière totalement préméditée par l'un de leurs dirigeants, ont elles-mêmes rompu le contrat moral qui avait été passé devant les clubs présents à l'issue de la rencontre du 4 février.

Dans ces conditions, nous vous informons que les arbitres de ligue, qui avaient démontré une position d'ouverture et de dialogue, ont décidé ce jeudi 16 février, à l'unanimité des membres présents:
- de maintenir leur mise en indisponibilité pour diriger les rencontres organisées par la ligue à compter du 22 février,
- de maintenir leur demandes d'excuse de la part de l'auteur de ces propos dans le Journal de la ligue.

Au vu de tous ces éléments, nous souhaitons réaffirmer à l'ensemble des clubs, dont nous sommes également membres à part entière comme tout autre licencié, que cette situation de blocage a bel et bien été provoquée et est désormais sciemment entretenue par les instances elles mêmes.

Dès lors, chacun comprendra que nous ne pouvons en être tenus pour responsables et c'est pourquoi nous invitons les clubs à se tourner vers les instances pour que celles ci démontrent enfin une réelle volonté d'y apporter  une issue favorable digne de ce nom.


3 février 2012

Article paru sur SOFOOT : Les Madoff du covoiturage

En Franche-Comté, les franches engueulades entre la Ligue régionale et les arbitres se succèdent depuis quelques mois. Plus précisément, depuis que le président de la commission des finances de la Ligue a parlé d’ « escroquerie » pour qualifier le comportement de certains arbitres adeptes du covoiturage et des frais de déplacement individuels. Un tacle appuyé qui a provoqué la colère des hommes en noir. Qui menacent la seconde partie de saison d’une grève du sifflet. Bisbilles à deux francs (comtois) ou véritable malaise des arbitres amateurs ? Explications. 

Les Madoff du covoiturage ?

Il y a parfois des mots qui peuvent faire aussi mal qu’un coup de crampons mal placé. La saison 2011-2012 avait pourtant bien commencé, en Franche-Comté, pour le football amateur. Sans phénomène de violence majeur à déplorer. Une situation appréciable que savaient savourer ceux qui possèdent un peu de mémoire locale. Car ces dernières saisons, de temps à autre, du côté de Sochaux, Besançon, Saint-Vit et Pontarlier, les esprits avaient pris la fâcheuse habitude de s’échauffer à l’approche des frimas hivernaux. En octobre 2006, plusieurs agressions avaient ainsi poussé le corps arbitral, soutenu par la ligue, à se mettre en grève le temps d’un « week-end blanc ». Rebelote à la fin de l’automne 2007. L’affaire eut même les honneurs de la presse nationale, Libération racontant ces « Terrains minés pour les hommes en noir ».

Mais en 2011, foi d’observateurs dominicaux, l’état d’esprit semblait correct. « Tout se passait bien sur le terrain », résume Sébastien Moreira, arbitre professionnel de Ligue 1 et 2 et président de l’antenne franc-comtoise de l’amicale française des arbitres de football (AFAF). Tout allait donc pour le mieux dans le meilleur des stades. Sauf que… Aujourd’hui, la quasi-totalité des arbitres de niveau régional, une cinquantaine d’hommes en noir, remontés comme des coucous, se sont mis en indisponibilité pour la reprise du championnat, fin février. Les matchs de DH, de ligue régionale 2 et 3 sont directement concernés.

« Escroquerie » et « discours populiste »

La raison de leur mécontentement ? Petit rappel des faits, pour ceux qui ne lisent pas assidûment l’Est républicain ou Le Pays. Le 4 novembre dernier, lors de l’assemblée générale de la ligue, Daniel Bourlier, président de la commission des finances, commence à expliquer qu’il faut faire attention aux dépenses. Entre autres gaspillages, cet ancien inspecteur divisionnaire des impôts en vient aux frais d’arbitrage. L’occasion de fustiger le fait que trois arbitres puissent faire du covoiturage et envoyer ensuite chacun une note de frais. Un système dont profiteraient certains. Le dirigeant va même jusqu’à parler d’ « escroquerie ». Sur le coup, le discours sur la chasse au gaspi est bien reçu par l’Assemblée, où sont représentés quelque 300 clubs – ce sont eux qui paient les indemnités des homes en noir. Mais le lendemain, la reprise du terme « escroquerie » dans la presse locale fait bondir les arbitres. Ils demandent des excuses publiques. « Le sujet a été lancé comme ça, sans explication et très maladroitement », déplore Sébastien Moreira, qui dénonce un « discours populiste ». S’il veut bien débattre du sujet du covoiturage « sur le fond », il tient à rappeler que le phénomène ne concerne qu’une minorité de déplacements. Et estime que les bases du débat ont été mal posées : « Il faut savoir que ce n’est pas un simple remboursement kilométrique, ce sont des frais de déplacement. Cela inclut le temps que l’arbitre passe pour le match. Quel que soit le moyen de locomotion, l’arbitre va toucher la même chose. S’il prend – j’exagère – l’avion ou le taxi, s’il dépense de l’argent et que ce qu’on lui donne ne le rembourse pas, tant pis pour lui, c’est son problème. S’il fait 50 bornes à vélo pour aller arbitrer, il aura aussi le droit à ses frais de déplacement… »

En France, les arbitres amateurs touchent des indemnités d’équipement fixés par la Ligue – 39 euros par match pour un arbitre central en DH franc-comtoise – auxquels s’ajoutent des frais de déplacement variant selon la distance les séparant du lieu du match – un peu plus de 30 centimes au kilomètre. Partager une bagnole est pour certains un moyen de faire des économies, tout en ne voyageant pas seul. « Ce qui fait la grosse différence, pour certains matchs, ce sont les frais de déplacement. Parfois, j’arrive à toucher 90 euros, rien que pour l’essence », raconte un jeune arbitre du nord de la France qui préfère rester anonyme. Si le covoiturage est une pratique légèrement borderline, elle est tolérée : « C’est quelque chose qui reste officieux. Après, les clubs nous voient arriver dans une seule bagnole, donc ils savent. » Et le jeune arbitre d’ajouter : « Je ne me considère pas comme un escroc. Je ne pense pas que ce sont les dépenses des arbitres qui sont les plus importantes pour la Ligue. Et quand on voit les primes de matchs qu’offrent certains clubs amateurs à leurs joueurs… » Et puis partager une caisse, ça casse la solitude, quand il s’agit d’enchaîner les longs déplacements : « On dit qu’on ‘tourne’ ensemble. Le voyage passe plus rapidement, c’est plus sympa. »

Plaintes pour diffamation et injure publique

Du côté de la Franche-Comté, sympa n’est peut-être pas l’adjectif adéquat pour décrire l’ambiance. Depuis les déclarations fracassantes de novembre, Noël est passé par là et les esprits ne se sont pas calmés dans une Ligue où les relations entre dirigeants et responsables de l’arbitrage sont souvent houleuses. Plusieurs plaintes individuelles ont été déposées au pénal contre Daniel Bourlier pour diffamation et injure publique. L’AFAF s’est fendue d’une plainte collective au civil. Les arbitres, qui souhaitent la démission du président de la commission des finances de la ligue, exigent des excuses. Ils pourraient attendre encore longtemps. Car Daniel Bourlier, à la ligue depuis une vingtaine d’années, ne veut pas revenir sur ses propos. Sans pour autant arriver à chiffrer le manque à gagner lié au covoiturage. Contacté par So Foot, l’homme s’est montré intarissable sur le sujet au téléphone. Tout en souhaitant que la conversation reste off. Il attend une table ronde prévue pour le 4 février, où la question sera évoquée entre les différents protagonistes de la polémique. Roland Coquard, le président de la ligue, a consenti de son côté à dire aux médias locaux qu’il n’aurait pas employé le terme d’ « escroquerie ». Mais les dirigeants voient surtout dans cette polémique une manœuvre politique pour tenter de les déstabiliser, alors que les élections de la Ligue se tiendront en octobre prochain.

A 42 ans, Christophe Torres est contrôleur à la SNCF la semaine. Le week-end, il chausse les crampons pour aller arbitrer les matchs de division d’honneur de Franche-Comté. Et il se défend d’être manipulé par qui que ce soit – « c’est trop facile de dire ça, de la bêtise pure ». Depuis 1988, le sifflet est comme un prolongement de son corps. « Je suis arbitre de ligue depuis le 1er janvier 1991 et j’officie sur les matchs de DH depuis 16 ans. Étant arbitre central, je vais de temps en temps chercher en voiture des assistants. Je n’aurais jamais pensé en arriver là », explique-t-il en référence à sa mise en indisponibilité jusqu’à la fin de saison qu’il a envoyée à la ligue. Entre les frais de déplacement et les frais d’équipement, Christophe Torres se fait « en moyenne, 70 euros par match ». L’argent n’est donc pas sa motivation, lui parle plutôt d’ « une passion ». « J’ai eu des cas d’agressions physiques, on m’a déjà craché dessus, j’ai donné sans compter, j’y ai passé mes week-ends, entre les matchs à arbitrer, les jeunes à superviser. La vie de famille, je l’ai mise entre parenthèses pendant dix ans. »

Chute des vocations sur les terres de Michel Vautrot

Sébastien Moreira estime que cette attaque contre les arbitres "fraudeurs" risque d’avoir des effets néfastes sur les vocations, en chute libre depuis plusieurs années. « En 1992, il y avait 1 100 arbitres en Franche-Comté, maintenant ils ne sont plus que 500 (niveau ligue et district confondus, ndlr)», constate-t-il. Un comble au pays de Michel Vautrot, l’une des figures les plus illustres de l’arbitrage français. Toujours est-il qu’à vouloir faire des économies, la Ligue de Franche-Comté risque au final de se retrouver dans la position de l’arroseur arrosé. Car les arbitres franc-comtois ont décidé de comparer leurs indemnités aux autres régions. Résultat : ils se situent parmi les moins bien indemnisés des 22 Ligues en France. Un sujet de plus qui risque donc de s’inviter à la table ronde du 4 février.

En attendant, les hommes en noir ne devront pas trop compter sur le soutien des Verts. Paradoxal, quand on sait que le covoiturage est une attitude green friendly prônée par le parti de Cécile Duflot et Eva Joly. Alain Fousseret, vice-président du conseil régional de Franche-Comté et élu EELV chargé des questions de transport et de multi-modalité, pas trop porté sur le sport, ne « voit pas trop l’intérêt de commenter ce conflit. » « Maintenant, si un jour, hors conflit, vous abordez la problématique des PDE – plan de déplacement des équipes – avec l’organisation des déplacements en covoiturage pour aller aux matchs, alors là… ».


SOFOOT Par Yann Bouchez

2 février 2012

Michel Vautrot : « Il y a un côté parano assez hallucinant ! »

Avec son habituel franc-parler, le mythique arbitre franc-comtois, Michel Vautrot, revient sur le conflit qui oppose actuellement les hommes en noir à la Ligue de Franche-Comté. Accrochez vos ceintures !

Il faut bien plus qu’une opération chirurgicale, dont il est seulement en train de se remettre dans la quiétude de son domicile bisontin, pour étouffer la fougue de Michel Vautrot.
L’ancien arbitre international et Directeur Technique National (*) n’a jamais mâché ses mots. Ce n’est donc pas aujourd’hui, alors que les arbitres francs-comtois ont décidé de se mettre en grève fin février (**), que le « grand » va dégainer la langue de bois. La preuve.
Michel Vautrot estime que le conflit actuel fait d’abord mal au football régional

Michel, avez-vous été consulté par les arbitres concernant le litige qui les oppose actuellement à la Ligue de Franche-Comté ? Et si tel est le cas, les comprenez et soutenez-vous ?

Vous savez, je suis toujours président d’honneur de l’Afaf (Amicale Française des Arbitres de Football), et j’ai forcément toujours gardé la fibre arbitrale. Je suis toujours solidaire d’eux, en tout cas quand je trouve que c’est normal. Alors oui, sur cette affaire, je suis vraiment derrière eux. Ils ont vraiment souffert moralement suite à l’AG de la Ligue. Ce qui me navre, c’est que ça devient une affaire d’État qui n’aurait jamais dû exister. Je ne veux juger personne, seulement constater des faits. D’abord, le mot « escroquerie » n’est pas un mot malheureux qui a échappé, il était au contraire mûrement réfléchi et préparé. Je veux bien qu’on aborde le problème des indemnités de déplacement, mais de là à jeter les arbitres en pâture devant les clubs lors de l’AG… On sait déjà que ce n’est pas la catégorie la plus aimée dans le milieu du football ; on dit que l’on ne peut pas faire sans eux, mais c’est toujours la catégorie la première visée. Et il n’y avait vraiment pas besoin de mettre de l’huile sur le feu. Ils ont voulu dénoncer une pratique, soit. Je suis bien placé pour en parler, j’ai lourdement payé par le passé pour avoir dénoncé des magouilles. Mais il fallait régler ça en interne, pas lors de l’AG et encore moins ensuite par journaux interposés.

Il y aura justement une table ronde organisée samedi à Besançon par Roland Coquard, le président de la Ligue…

(Il coupe) Mais à quoi elle va servir, franchement, cette table ronde ? Dites-le moi ! Premièrement, je trouve dommage que le président n’ait pas mis un bémol tout de suite, lors de l’AG, aux propos tenus, car cette intervention de M. Bourlier n’était pas anecdotique. Et maintenant, il organise cette table ronde. Moi, franchement, si j’avais été directement concerné et invité, je n’y serais pas allé. N’est-ce pas tout simplement au comité directeur de la Ligue de régler ce problème ? Il y a des gens élus pour diriger l’arbitrage et le football dans notre région, non ? Ça veut dire quoi, que les élus de la Ligue ne sont pas compétents pour régler ça ? C’est le comité directeur qui devait se charger du problème en recevant les arbitres, et en leur répondant. Point.

Et sur le fond ? Quel est votre avis sur les indemnités touchées par les trois arbitres alors qu’ils n’utilisent qu’une seule voiture ?

Si nos arbitres de ligue gagnaient de l’argent, franchement, ça se saurait. Ce système, il existe depuis tout le temps, et ce sur l’ensemble du territoire. Je tiens à préciser que ce ne sont pas des frais de déplacement qui sont versés, mais une indemnité, une sorte de forfait qui comprend tout, y compris le repas, les péages, etc. Qu’est-ce qu’on va faire ? Demander à un arbitre qui est cheminot d’y aller en train pour faire des économies ? Et si le moteur de la voiture pète, qui va payer ? Bref, désormais, notre Ligue se décide à laver plus blanc que blanc, et je dis pourquoi pas. Mais jusqu’à maintenant, aucune règle ne dit que c’est interdit. Or, le terme utilisé, « escroquerie », signifie qu’il y a des tricheurs. Et que s’il y a des tricheurs, ils doivent être punis. Mais punis de quoi ? Non, vraiment, on ne peut pas attaquer toute une corporation comme ça, et surtout pas faire de telles généralités. Surtout qu’en Franche-Comté, nos arbitres comptent parmi les moins bien payés de France. Et ce sont les clubs qui paient après tout, ç’aurait été à eux de rouspéter s’ils trouvaient ça anormal. Encore une fois, le système est fait comme ça. S’ils veulent le changer, qu’ils le fassent, mais au final ça leur coûtera encore plus cher !

Du côté des opposants, on estime que cette « affaire » est le premier coup d’une partie d’échecs, avec en ligne de mire les prochaines élections pour la présidence de la Ligue prévues cette année. Pouvez-vous l’imaginer ?

Mais pas du tout ! C’est même grave de penser ça. Il y a un côté parano assez hallucinant ! Sébastien Moreira, qui défend les arbitres, évolue en Ligue 1 actuellement. Vous pensez qu’il veut devenir président de la Ligue ? Franchement, c’est prendre les arbitres pour des cons de lancer ça. S’ils connaissaient mieux le tissu de l’arbitrage, ils verraient que ce sont des personnes qui ont des responsabilités professionnelles et sportives, des personnes sensées, calmes qui sont montées au créneau. J’ai senti un vrai malaise chez eux. On accuse certaines personnes de manipulation… pfff… Ils ont tout faux, avec un grand F. Je pense par exemple à Claude Ravier, qui est un gentleman, un type constructif qui occupe un poste à responsabilités au Conseil Général du Doubs. Ou à Bernard Coutet, la sagesse faite homme. Comment peut-on faire une si mauvaise analyse ? Il ne faut pas s’étonner que ça dégénère.

Comment sortir rapidement, et la tête haute, de cette crise ?

Déjà, je pense que c’était une erreur de la part des arbitres de demander la démission de Daniel Bourlier. C’était franchement malvenu, et ce n’est plus le cas. Non, il y a deux options, mis à part cette table ronde qui ne sert à rien : soit il s’excuse de ses propos, soit il les maintient. S’il s’excuse, on en tirera les conclusions, s’il les maintient, alors les arbitres se détermineront sur la marche à suivre. La solution est d’une simplicité biblique. Les arbitres ont été traités de tricheurs sans que l’on donne tous les tenants et aboutissants. Alors à mon avis, s’il n’y a pas d’excuse, ça ne bougera pas.

Quel peut être votre mot de la fin, en attendant la suite des événements ?

Tout simplement : ça me fait de la peine. L’arbitrage franc-comtois est une école, mais on ne le voit jamais mis en valeur. La CRA (Commission Régionale de l’Arbitrage) fait un boulot énorme par exemple… Malheureusement, il y a encore cette affaire, qui a pris des proportions énormes. Et qui fait du mal à notre football.
* Il a été écarté par les instances sportives de la FFF en 2003 pour avoir dénoncé une affaire de corruption.
** Après une intervention de Daniel Bourlier lors de la dernière AG de la Ligue dénonçant des arrangements au niveau des frais arbitraux, parlant notamment « d’escroquerie », les arbitres de ligue ont décidé de se mettre « en disponibilité » fin février, c’est-à-dire au moment de la reprise des championnats. Et ce jusqu’à la fin de la saison..

Le Pays