Photo Lionel Vadam
Sébastien Moreira va lancer sa troisième saison d’arbitre en Ligue 1, samedi avec Ajaccio - Toulouse. Reconnu et loué pour son sens du dialogue sur le terrain, le Belfortain fait partie des arbitres qui montent dans le championnat de France.
C’est au club des Portugais de Belfort que ce natif de la cité du Lion a lancé sa carrière d’arbitre. Un club auquel il reste très attaché et où il compte de nombreux supporteurs. Son ascension dans l’arbitrage français, Sébastien Moreira (34 ans) la doit à son souci de dialoguer et de préserver cette valeur forte qu’est le respect, tout en balayant l’image de l’arbitre simple « gendarme ou flic » sur le terrain. Si son grand regret reste de n’avoir pas encore sifflé au stade Vélodrome, Sébastien Moreira va ouvrir le feu de la Ligue 1 avec ambition en Corse samedi soir, « mais sans appréhension », avoue ce chargé de communication à la Poste à Dijon.
Sébastien Moreira, comment aborde-t-on sa troisième saison en Ligue 1 ? Avec plus de sérénité ? De certitude ?
Disons que la première année, il est important de se faire connaître, de se faire un nom, de voir aussi si on a le niveau. Ensuite, lors de la seconde, il est indispensable de confirmer. De nombreux jeunes arbitres sont redescendus. Il y a une vraie compétition, un classement des arbitres chaque saison. Pour cette 3 e saison, je suis un peu plus serein, c’est vrai, car en toute humilité, les gens de la Ligue 1 me connaissent, savent quelle est ma manière de fonctionner.
Justement, globalement les joueurs de la Ligue 1 louent votre capacité à dialoguer. Ce qui n’est pas le cas de tous les arbitres auxquels ces mêmes joueurs reprochent souvent d’être un peu trop hautains et distants…
Je pars du principe que nous sommes tous partenaires. Le respect, le dialogue, c’est ma manière de fonctionner. Je n’ai jamais hésité, avant le match, à aller voir les joueurs pour discuter.
Je me suis servi des joueurs passés à Sochaux et qui sont dans d’autres équipes, par exemple, pour qu’ils soient des relais, comme Pitau ou Pedretti. Après, je fais confiance aux joueurs et je dialogue encore avec eux quand ils ont triché, ou n’ont pas été corrects. J’ai une anecdote avec Mignot l’Auxerrois (N.D.L.R. aujourd’hui Stéphanois). À trois minutes de la fin, j’avais accordé un corner qui n’existait pas à Auxerre face à Lens. Et Mignot a marqué, suite à ce corner. Il s’est ensuite étendu, sur Canal +, pour dire que j’avais eu tort de siffler ce corner. Je suis allé lui faire remarquer que c’était maladroit de sa part, pas correct. Il l’a reconnu. Aujourd’hui, il n’y a pas de problème entre nous. Et puis, quand je mets un carton, j’essaie d’expliquer pourquoi au joueur sur le terrain. Je n’exhibe pas le carton à sa face. Je ne suis pas une bête physique comme Clément Turpin qui court partout, alors j’arbitre avec mes atouts.
La pression est réelle sur les arbitres aujourd’hui. Tous les matches sont disséqués, seconde par seconde. Ressentez-vous cette pression ? Pèse-t-elle sur vous pendant un match ?
Franchement, sur le terrain, je ne me pose pas de questions par rapport à cela. Je reste naturel dans mon arbitrage. Mais c’est pénible, parfois, de voir de quelle manière sont présentées, commentées les erreurs. Nous ne sommes que des êtres humains. Bien sûr que nous faisons des fautes mais certains exagèrent à certains moments. Le jeu médiatique fait partie du football évidemment et l’arbitre reste une cible facile. Nous ne sommes pas pros mais semi-pros. Et pourtant, là, je sors de deux jours de stage à Clairefontaine et je peux vous dire que nous avons passé des tests physiques très poussés. Peut-être avons-nous nous aussi commis des erreurs de communication comme, par exemple, lors de la grève de mars. Mais globalement, l’arbitre ne doit plus, n’est plus perçu, je pense, comme un gendarme, un flic avec son sifflet.
Chaque avant-saison est l’occasion pour le corps arbitral de se réunir et de soulever l’attention sur certains gestes qui seront sanctionnés. Qu’en est-il cette saison ?
Il y a trois ou quatre ans, l’accent avait été mis sur les tirages de maillots. Il y a deux ans, c’étaient les mains dans la surface….
Cela avait prêté à discussion avec ces fameuses mains et bras collés au corps, un geste difficile à réaliser par les joueurs.
Oui, mais aujourd’hui cela semble rentré dans les mœurs. On voit beaucoup plus de joueurs sauter les bras dans le dos. Cette saison, il va surtout s’agir des « semelles ». Vous savez, ces pieds qui en écrasent un autre et qui sont extrêmement dangereux. On voit de plus en plus ce geste. Sinon, il n’y aura pas de grande nouveauté, si ce n’est une extrême vigilance sur les coups de coude ou autres gestes de la sorte. La saison dernière, il y a eu 4 % de cartons jaunes en moins. C’est la preuve qu’on maîtrise mieux le jeu. On va également pouvoir avoir une relation encore plus grande avec les entraîneurs car un protocole a été mis en place. On les verra une heure avant le coup d’envoi dans notre vestiaire, puis brièvement à la mi-temps et, enfin, un débriefing sera instauré juste après le coup de sifflet final et avant la conférence de presse.
Cela avait prêté à discussion avec ces fameuses mains et bras collés au corps, un geste difficile à réaliser par les joueurs.
Oui, mais aujourd’hui cela semble rentré dans les mœurs. On voit beaucoup plus de joueurs sauter les bras dans le dos. Cette saison, il va surtout s’agir des « semelles ». Vous savez, ces pieds qui en écrasent un autre et qui sont extrêmement dangereux. On voit de plus en plus ce geste. Sinon, il n’y aura pas de grande nouveauté, si ce n’est une extrême vigilance sur les coups de coude ou autres gestes de la sorte. La saison dernière, il y a eu 4 % de cartons jaunes en moins. C’est la preuve qu’on maîtrise mieux le jeu. On va également pouvoir avoir une relation encore plus grande avec les entraîneurs car un protocole a été mis en place. On les verra une heure avant le coup d’envoi dans notre vestiaire, puis brièvement à la mi-temps et, enfin, un débriefing sera instauré juste après le coup de sifflet final et avant la conférence de presse.
Vous allez débuter samedi à Ajaccio, là où ce n’est pas toujours le plus facile d’arbitrer. Avez-vous une appréhension ?
Désormais, j’avoue, je n’ai plus d’appréhension à l’idée de me rendre dans un stade ou un autre. Je suis content que la Corse ait retrouvé un club en Ligue 1. Il y a là-bas une ambiance, un esprit qui se sont un peu perdus et que l’on retrouve un peu dans des clubs comme Saint-Étienne, Lens, où les gens ont vraiment l’amour du club. Ce sera le premier match, celui qui donne le ton de la saison. Je serai vigilant. Je sais qu’à Ajaccio, il peut toujours se passer quelque chose. Mais bon, je vous le répète, je n’ai aucune appréhension.
Propos recueillis par Gilles Santalucia